Hop ! N°1
I) Pourquoi avez-vous porté votre choix sur une héroïne japonaise et de surcroit électronicienne ?
– Yoko jouait un rôle de second plan dans une histoire dont j’avais écrit le scénario en I968 ( Jacky et Célestin de Peyo, que ce dernier m’avait proposé de reprendre). “Spirou” a qui j’avais présenté cette série préféra me voir créer des personnages neufs. J’ai proposé Nic et Pol.. je me suis souvenu de Yoko et je leur ai adjoint ce personnage féminin pour former un trio : Le trio de l’étrange. Pour des raisons commerciales j’ai débuté par de courtes séries ne reprenant qu’un personnage….. Yoko étant la plus typée, je l’ai choisie (un peu parce qu’elle était ma préférée ). Peu après, les lecteurs l’ayant acceptée, je n’ai pu faire marche arrière et elle est. passée en premier plan. Elle est japonaise parce que dans cet ancien scénario, elle l’était déjà. Je m’étais, attaché à ce visage asiatique assez difficile à rendre et très énigmatique à fixer (pour l’âge). Elle est électronicienne parce qu’étant fervant amateur d’électronique, j’y suis tout naturellement ouvert .
2) La couleur semble jouer un grand rôle dans vos personnages, par exemple outre le teint de Yoko, les vinéens sont bleus comme les Schtroumpfs, pourquoi ?
– Il n’y a aucune prise de conscience devant le problème racial dans mes personnages (Yoko est asiatique donc de teint jaunâtre ). Les vinéens devaient être violacés… mais 1’imprimerie les aurait rendus une fois roses, une fois bleus. Alors on a opté pour une couleur de base unique…. le bleu…… lorsque l’imprimerie force, ils sont parfois, à mon grand regret trop proches du ton des “Schtroumpfs”.
3) Yoko est-elle un personnage uniquement imaginaire ?
– Oui, aucun personnage existant ne me l’a inspirée…. disons qu’elle est bien à l’image de la fille moderne : sportive, roulant à moto et ayant un métier qui s’ouvre de plus en plus aux femmes. Je n’ ai pas voulu en faire un modèle de la femme libre mais je m’attache à ce qu’elle le soit au maximum… dans le sens positif ! !
4) Vous retrouvez-vous dans le caractère d’un des personnages secondaires ?
– Pol….. je suis râleur mais je me plie à toute corvée de bonne grâce après avoir rouspété ! Dans Ingrid ( “L’Orgue du Diable” ), je lui ai donné mes goûts pour l’orgue et les capacités que j’aurais bien voulu avoir, (jouer du piano ou de l’orgue. Ce qui est difficile en tenant un crayon ! Je me contente donc d’écouter mes disques et de rêver. On transmet toujours un peu instinctivement ce que l’on aimerait faire à des caractères que l’on crée. Je crois que c’est vrai pour tous les dessinateurs.
5) La science fiction est votre thème actuel, ne regrettez-vous pas l’époque d’Alix dont vous avez réalisé de nombreux décors ?
– Non, j’ai collaboré avec Jacques Martin durant I8 ans et si j’ai toujours donné le maximum pour réaliser les décors d’Alix (j’aimais bien ce personnage) je dois avouer que l’histoire de l’antiquité, les temples grecs et romains ne m’ont jamais beaucoup passionnés…. J’aimais mieux les décors de Le-franc et je rêvais que si je passais un jour indépendant, je ne ferais pas de la B.D. historique. Et comme j’ai toujours eu un très grand faible pour la science fiction depuis mon enfance…..
6) Quelle différence trouvez-vous entre le travail à l’atelier d’Hergé et le fait de travailler seul maintenant ?
– Le but recherché est le même : donner le meilleur pour réaliser une BD valable.. mais les moyens inégalement puissants… Les miens sont plus modestes et, je dois, pour m’assurer une rentrée viable, m’astreindre à plus d’heures de travail, car je dois tout faire moi même sans aucune aide! Avec la vente des albums, les possibilités augmentent, mais je suis déjà très heureux maintenant de la tournure des événements.
Côté pratique, j’ai plus d’heures de rendement pour une fatigue identique. Je ne dois plus faire une heure et demie de voiture pour me rendre et revenir de mon travail et, comme je travaille à la campagne, je suis dans des conditions maximales de tranquillité.
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